L’accord de Paris lors de la #COP21: un tour de force diplomatique, et un défi….économique pour la #COP22 !

 

Foto de Familia presidentes CCBY UNFCCC via Flickr
Foto de Familia presidentes CCBY UNFCCC via Flickr

 

 

 

 

 

Il incombe donc aux états, pour la prochaine étape (#COP22) qui aura lieu au Maroc l’an prochain, de créer des conditions d’un investissement massif en faveur du déploiement des solutions décarbonées au niveau mondial.

Après la forte émotion suscitée par le tour de force diplomatique que constitue l’Accord de Paris, dans le cadre de la COP 21, plusieurs jours de recul étaient nécessaires.

Aujourd’hui, je considère, après tant d’années passées sur le sujet des pollutions globales (dont le changement climatique et la transition vers le développement durable), que l’Accord de Paris a su relever les défis sans précédents que représentait cette COP 21:  parvenir à un accord permettant de contenir le réchauffement global en deçà de 2°C et s’appliquant à tous les pays.

En d’autres termes, les négociateurs ont su trouver le mode d’insertion des Pays en Développement ou en Transition, dont la Chine, qui n’étaient pas contraints dans le Protocole de Kyoto et faire revenir les États-Unis dans le dispositif multilatéral ; sachant que les États-Unis et la Chine pèsent, à eux deux, pour plus de 42% dans les émissions mondiales de CO2.

Cependant, force est de constater que les principaux obstacles qui sont d’ordre économique demeurent.

L’après Kyoto laisse à chaque pays la responsabilité de définir ses propres objectifs et d’inventer ses propres instruments, économiques ou non. Cette situation présente des risques, mais elle offre aussi une opportunité d’expérimentation inédite de différents mécanismes économiques et de nouveaux schémas de coopération. De plus, elle rend visible l’engagement climatique de chaque pays. Elle favorise enfin une approche « multi-stakeholders » de la lutte contre le changement climatique en incluant d’autres acteurs, à d’autres échelles, que les seuls gouvernements. Elle intègre des entreprises, des territoires, des régions, des métropoles, des villes, des ONG et des citoyens qui, dans bien des cas, ont montré, sur le terrain leur engagement et leur efficacité.

La Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques a dès lors la charge de favoriser les nouvelles initiatives en encourageant les pays à afficher des ambitions suffisantes en matière de réduction de gaz à effet de serre, en veillant à leur cohérence et en faisant connaitre les plus efficaces.

Mais, pour pouvoir vraiment voir les solutions se mettre en place, la diffusion d’un signal prix du carbone est indispensable. Lui seul est en mesure de faire évoluer les modèles économiques et de parvenir à une réduction des émissions de CO2. Tous les économistes travaillant sur ce sujet sont unanimes sur cette question, y compris le prix Nobel d’économie Jean Tirole ! Pourtant cet aspect économique a été absent des discussions officielles de la COP 21 car il n’est pas recevable, pour beaucoup de pays, aujourd’hui !

COP21 CCBY CIEAU via Flickr
COP21 CCBY CIEAU via Flickr

 

La théorie économique nous enseigne que si l’on veut augmenter les flux financiers vers les investissements sobres en carbone et réduire les investissements dans les activités intenses en carbone, alors le carbone doit avoir un prix en relation avec les « externalités » qu’il génère. Sinon l’opérationnalisation de l‘Accord de Paris se heurtera à un système économique aveugle et sourd aux impacts du changement climatique avec des agents économiques qui ne verront pas l’intérêt d’en tenir compte !

En effet tant que les coûts du changement climatique ne sont pas imputés, via un prix du carbone stable et généralisé, dans le bilan des opérations en fonction de leur intensité carbone, les entreprises et plus largement tous les acteurs économiques, ne pourront pas orienter leur choix de long terme grâce à un signal-prix. Il sera dès lors difficile d’inciter la mise en place de solution décarbonées pourtant si nombreuses ! C’est pourquoi, de plus en plus d’entreprises sont demandeuses d’un effort de coordination internationale pour obtenir un prix du carbone, au niveau international, et pour éviter le dumping « carbone » de certains pays.

Le même besoin d’un prix du carbone s’avère un pré-requis pour mieux lever des financements privés. Il existe en effet des capitaux disponibles si l’on est capable d’instaurer des conditions favorables et la première de ces conditions est la tarification du prix du carbone.

Ce n’est pas à cause d’un déficit d’épargne que les investissements d’atténuation sont bloqués. Ils le sont, comme les autres investissements productifs, à cause d’une intermédiation financière qui favorise les actifs liquides au détriment des investissements de long terme.

Ajouté à un mode de management des entreprises privilégiant la valeur immédiate de la firme, ce comportement tend à orienter l’épargne vers des placements spéculatifs tels que l’immobilier traditionnel très « carboné ». La transition vers la décarbonisation de l’économie pourrait se mettre en marche en rendant non compétitifs de tels investissements, via un prix du carbone reflétant ses vraies externalités.

Un tel choix est bien sûr complexe du point de vue géopolitique, dans la mesure où cela conduit inexorablement à la fin de l’exploitation du charbon disponible et des ressources d’hydrocarbures.

Il incombe donc aux états, pour la prochaine étape (#COP22) qui aura lieu au Maroc l’an prochain, de créer des conditions d’un investissement massif en faveur du déploiement des solutions décarbonées au niveau mondial.

Pour ce faire, ils devront s’accorder sur un prix, au moins de référence, du carbone Ces solutions pourront alors constituer un moteur d’innovations sans précédent et positionner l’économie mondiale sur une trajectoire de croissance soutenable.

On connait déjà l’enjeu de la COP 22 !