Les 23 et 24 janvier 2020 se tenait dans les locaux parisiens de INSEEC U le second workshop national sur le classement international UI GreenMetric des établissements d’enseignement supérieur les plus engagés sur le développement durable. Consacré à l’économie circulaire, ce workshop nous a permis de constater la diversité des thèmes englobés par l’économie circulaire. Ces deux jours d’ateliers n’ont pas été consacrés à la gestion des seuls déchets ! Six sessions en tout ont été autant d’occasions d’aborder l’économie circulaire dans toute son acception, des mythes à sa mise en œuvre concrète, en passant par ses mutations, sa réalité industrielle, ou encore le développement important de nouveaux services dits durables.
L’économie circulaire, un univers encore méconnu
L’économie circulaire semble faire désormais partie de notre quotidien si l’on en croit les médias, les nouvelles starts-ups qui se créent dans cet univers ou encore les déclarations politiques. Pourtant, lorsque l’on regarde les choses de plus près, ce que nous propose de faire un étude du CREDOC de mars 2019 intitulée « Consommation durable : l’engagement de façade des classes supérieures » on s’aperçoit que 65 % des répondants en moyenne déclarent ne pas savoir de quoi il s’agit. 10 % parlent d’une économie favorable à l’écologie et au recyclage et 9 % d’une économie reposant sur les circuits courts et les produits locaux. Preuve, s’il en est, qu’il faudra encore un travail pédagogique colossal pour la faire connaître, 51 % des sondés n’en ont même jamais entendu parler ! Et même lorsque l’on leur propose des réponses possibles, ils se montrent hésitants : 48 % pensent qu’il s’agit d’un modèle reposant sur le recyclage, 44 % évoquent une économie de proximité.
Cette méconnaissance s’accompagne cependant d’une indéniable conscience écologique. En témoignent les réponses à la question : Que pensez-vous de l’économie circulaire ? 86 % y voient un modèle nécessaire, 76 % s’estiment concernés par le sujet. 69 % la trouvent réaliste à l’échelle d’une société. 32 % pensent que cela ne touche que les entreprises.38 % qu’il s’agit d’une simple mode (sic).
Comme Arnaud Zegierman, Directeur associé de l’institut de sondages Viavoice et qui intervenait lors de notre workshop, je pense qu’il ne faut pas chercher à diviser les Français entre ceux qui adhèrent aux principes de l’économie circulaire et les autres. L’économie circulaire est sans doute une des clés de la transition écologique et qu’aux côtés d’autres solutions / leviers elle permettra de rendre nos économies plus durables.
Économie circulaire : une conscientisation en hausse depuis 2019 ?
2019 sera-t-elle une année en forme de point zéro sur les questions environnementales ? J’ai déjà évoqué dans ce blog comment les prises de position de la jeunesse pouvait favoriser une prise de conscience globale.
Depuis l’avènement de la génération climat, un basculement s’est opéré. Les grands groupes se sentent davantage concernés par la RSE, poussés en cela par leurs salariés. Aujourd’hui, le Green Washing est tout simplement devenu impossible. Si vous mentez aux consommateurs, vous le payez cash. Avec l’aide des réseaux sociaux, il suffit d’un tweet ou d’une vidéo pour les mobiliser. Sur l’économie circulaire nous sommes devant le même défi. Le story telling seul n’est plus admis. Il faut passer au story making. Ce changement s’opère à tous les niveaux. C’est ce que nous rappelle François-Michel Lambert, le fondateur de l’institut National pour l’économie circulaire (INEC). À l’origine de cet institut un think tank qui s’est rapidement mué en do tank opérationnel capable d’agir de manière concrète à partir de quatre principaux leviers : la fiscalité, la réglementation, les incitations, et l’évolution des compétences.
Pour les autres innovations, je vous invite à prendre connaissance du grand nombre d’innovations dont vous retrouvez les mentions dans les vidéos que nous avons réalisées à l’occasion de ce workshop. Elles ne sont pas toutes technologiques et vont au-delà des tech for good en proposant une nouvelle comptabilité écologique, des monnaies complémentaires, l’upcycling et la question, parfois polémique, du revenu universel.
La France en retard pour l’économie circulaire ?
On reproche souvent à la France son relative manque d’engagement formel en faveur de l’économie circulaire alors que certains de nos voisins directs comme le Luxembourg ont fait de l’économie circulaire une politique nationale. En général l’Europe du Nord semble plus en avance que la France sur ce sujet. Mais comme souvent la France a ses spécificités. Les efforts et impulsions concernant la promotion ou le développement de l’économie circulaire sont partagés entre l’État, les associations, les collectivités locales et les entreprises. Bien que différent de nos voisins, notre modèle est pertinent du point de vue des valeurs véhiculés par le développement durable car il concerne tous les acteurs de la société. Et surtout il favorise l’innovation.
Une des tendances actuelles de l’économie circulaire concerne l’upcycling. C’est ce que propose Bilum qui grâce à la récupération de matière qui a déjà servi pour la fabrication d’un nouveau produit est capable d’offrir une nouvelle destination, un nouvel usage à ces matériaux. Bilum a ainsi recyclé les housses de siège d’Air France et des gilets de sauvetage en pochettes. L’upcycling a néanmoins ses limites. Les coûts de production restent relativement élevés car le traitement de la matière et le rendu « made in France » ne sont possibles que dans le cadre d’une prestation de qualité.
Quelles mutations de l’économie circulaire pouvons-nous constater ?
Si les usages liés à l’économie circulaire (recyclage, relocalisation de la consommation, réutilisation de matériaux) s’imposent chez certaines communautés à l’avant-garde de la conscience environnementale il faut, pour leur généralisation au sein de la société, faire émerger ce que les spécialistes de l’éducation appellent un Sustainable Mindset. Chez les plus jeunes apprenants, cela correspond à créer les conditions favorables à l’apprentissage et l’intégration à long terme des problématiques liées au développement durable. J’ai toujours soutenu que l’éducation au développement durable est indispensable. Et aujourd’hui plus que jamais alors que nous apprenons via le Global Reporting Initiative, recensant les objectifs du développement durable mis en place en 2015 par l’ONU, que les questions écologiques ne dépendraient plus de la direction du développement durable mais du directeur général, tant elles sont cruciales.
Comme un mouvement de balancier permanent, on observe certains reculs et on constate aussi des avancées. Dans notre pays, depuis 2017, les entreprises de plus de 500 salariés ou au CA supérieur à 40 millions d’euros se sont vues imposer un reporting extra financier incluant les mesures prises pour l’adaptation aux conséquences du changement climatique et les objectifs de réduction de gaz à effet de serre à moyen et long terme.
L’AFNOR a décidé de mettre au point une norme, baptisée XP X30-901. Cette dernière repose sur 7 angles, de l’approvisionnement durable à la gestion efficace des matières ou produits en fin de vie (réemploi, réutilisation, recyclage). Plus de 50 organisations ont participé à son élaboration, parmi lesquelles l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), l’Institut national de l’économie circulaire (INEC) ainsi que des entreprises comme Tarkett (spécialiste du revêtement de sol), Véolia et Eiffage (l’un des leaders du BTP).
De là à conclure que l’économie circulaire s’impose peu à peu en France, il n’y a certes qu’un pas mais que je souhaite accompagner pour ma part ce mouvement en mettant régulièrement l’accent dans ce blog sur cette mutation indispensable de notre économie et de notre société.